Interview de Christophe Hurbin fondateur et président de MYLABEL, par ICI AGRIFOOD

Ingénieur spatial de formation, Christophe a eu la chance de pouvoir observer notre planète terre avec un oeil de « spationaute » et de prendre conscience de son caractère unique et précieux dans l’univers. Après 10 ans d’expérience professionnelle dans
l’industrie, Christophe a souhaité s’orienter plus spécifiquement vers le développement durable : le constat de la difficulté pour le consommateur de réaliser des choix éclairés sur les produits alimentaires qu’il achète, faute d’informations qualifiées, va être l’étincelle pour créer MYLABEL.

Bonjour Christophe, peux-tu nous présenter l’application myLabel ?

myLabel est une application qui permet d’informer les citoyens sur leurs achats alimentaires. Le consommateur d’aujourd’hui souhaite choisir et faire évoluer son alimentation en fonction de critères environnementaux, sociaux, santé qui lui sont propres : myLabel va sourcer des informations auprès d’organismes tiers, associations ou ONG qui ont la confiance du consommateur, et les mettre à sa disposition pour faciliter son choix. De plus, si le produit initialement choisi n’est pas conforme à ses attentes, le
consommateur aura accès à des alternatives de produits plus en accord avec ses critères.

myLabel c’est aussi un service B2B pour les entreprises, afin qu’elles puissent avoir accès à des données agrégées anonymes sur les préférences des consommateurs : mieux comprendre l’évolution des comportements, communiquer sur leurs produits en intégrant par exemple notre scoring sur leur site vente en ligne ou encore faire évoluer leur offre d’alimentation durable leur permettra de mieux répondre aux nouvelles attentes des consommateurs.

Quel a été ton parcours et les partenaires clés pour avancer dans cette aventure de l’entrepreneuriat ?

J’ai créé myLabel en 2017 mais il a fallu 2 ans de « gestation » pour être en capacité de lancer officiellement la solution B2C en avril 2019. Je suis le fondateur de myLabel, mais il est vraiment difficile de se lancer seul dans une telle aventure et j’ai donc été amené à rechercher des associés : c’est une étape importante qui nécessite de s’assurer que les associés choisis sont alignés sur une même vision de l’entreprise à long terme, qu’ils sont prêts à s’investir (si possible à 100 %) et en phase sur les questions de rémunération et de gouvernance. Aujourd’hui nous sommes 3 associés plus 3 salariés dans l’équipe.

Dans la phase de démarrage, le choix de locaux accessibles en terme de tarif et proposant des animations pour aider le fondateur à sortir la tête du guidon est aussi un facteur de succès. Dans cette période, il est fondamental de s’entourer de personnes compétentes qui vont pousser la startup à avancer. Ainsi, myLabel, avant son installation à Lyon, a pu bénéficier de l’accompagnement d’incubateurs comme IMT Starter (Incubateur des écoles Télécom SudParis, Institut Mines Télécom Business School et ENSIIE) puis du Réseau Entreprendre et de ses formidables mentors exigeants mais bienveillants.

Côté partenaires financiers, myLabel a sollicité de nombreuses aides financières indispensables dans une phase initiale où la startup ne produit pas de chiffre d’affaire et ne peut donc pas mobiliser de prêts bancaires. Une bourse FrenchTech, l’accès à des
fonds spécifiques pour les projets numériques via la fondation Mines-Télécom et l’octroi d’un prêt d’honneur via le Réseau Initiative ont été des aides précieuses. En parallèle, une opération de crowdfunding via We Do Good, qui permet aux investisseurs de choisir des projets à impacts économiques, sociaux, et environnementaux positifs en échange de royalties, s’est révélée, de mon point de vue, plus intéressante que le don avec les deux avantages de ne pas diluer l’actionnariat et d’offrir un retour financier aux personnes qui vous ont soutenu.
myLabel a aussi obtenu l’agrément Esus, Entreprise de l’Economie Sociale et Solidaire et a ainsi pu bénéficier d’un prêt participatif de France Active à hauteur de 150 K€. Il a aussi fallu du temps pour réussir à construire les coopérations nécessaires au
fonctionnement de myLabel avec des associations, institutions ou ONG (Greenpeace, Oxfam, l’Institut National de la Consommation, l’Ademe…) permettant un libre accès à leurs contenus pour constituer ensuite une information utile pour les consommateurs.

Quelle est ta définition de ce secteur de la consommation et ta vision de son évolution ?

C’est un secteur bouillonnant avec l’apparition de nombreuses applications qui visent à apporter des informations décryptées aux consommateurs. L’arrivée de ces différentes applications a permis de booster la transparence, enjeu aujourd’hui incontournable pour le consommateur mais aussi pour les entreprises qui ont tout intérêt à produire des informations correctes et à jour pour montrer qu’elles progressent et innovent. Le deuxième enjeu fort c’est la traçabilité et la possibilité d’apporter des informations sur l’origine des ingrédients, via la blockchain par exemple, et d’aller sur des sujets de commerce équitable.
Certaines applis sont basées uniquement sur des critères quantifiables et consensuels comme le Nutri-Score, myLabel se différencie en ajoutant à ceux-ci des critères plus qualitatifs sur lesquels il n’existe pas encore de consensus entre tous les acteurs, comme la biodiversité, l’égalité femmes/hommes, le bien-être animal.

Quelle a été l’impact de la crise sanitaire sur ce secteur ?

Cette crise a un impact important sur les startups qui doivent mobiliser des ressources importantes pour se réinventer en fonction des évolutions des attentes des consommateurs. Avant la crise, l’intérêt du consommateur était principalement focalisé
sur les aspects santé. Dès le premier confinement, le consommateur a développé une curiosité accrue sur l’environnement, les conditions d’élevage, l’origine des produits, l’éthique. Le deuxième confinement a entraîné une sorte de repli sur soi du consommateur, avec un retour vers les critères santé, comme éviter les additifs controversés et les pesticides. La sortie de crise sera probablement propice à une réouverture en terme de critères de choix de son alimentation.

Comment vois-tu la FoodTech, comment peut-elle être utile aux startups ?

C’est une communauté hyper féconde qui rassemble des acteurs alignés sur le sujet de l’alimentation durable, quels que soient les produits ou services proposés par chacun. Cette communauté, active et accessible, facilite l’interconnexion entre startups ainsi que les échanges avec les institutions et autres membres de la communauté et répond ainsi à un vrai besoin des startups FoodTech de mieux se connaître et d’agir ensemble au sein de cet écosystème.

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