
Bonjour Katia, peux-tu nous présenter Handi Gaspi et la dimension impact positif de son offre ?
La Biscuiterie Handi-Gaspi est une entreprise à impact social et environnemental qui a pour but de lutter contre le gaspillage alimentaire en créant de l’emploi inclusif. Elle valorise les invendus et les coproduits en recettes gourmandes qui sont entièrement fabriquées et conditionnées par des personnes en situation de handicap.
Nous avons démarré l’activité en mars 2022, en région nantaise, en collectant les invendus de pain chez les boulangers locaux et en les transformant en chapelure. C’est cette chapelure qui devient notre matière première pour fabriquer nos biscuits sucrés et salés, commercialisés sous la marque Kignon.
Depuis sa création, Handi-Gaspi a formé 30 travailleurs handicapés sur un nouveau métier et a sauvé 300 à 500 baguettes par jour qui ont permis la fabrication de 40 000 biscuits par jour. Nos recettes contiennent 20 % à 40 % d’ingrédients upcyclés.
Qu’est-ce qui a motivé la création de la biscuiterie Handi-Gaspi ?
Cette idée a émergé grâce à la rencontre avec Alix Guyot et Louise Doulliet, co fondatrices de Handi-gaspi, au sein d’une association qui œuvrait en faveur de l’insertion des personnes en situation de handicap. Notre parcours en industrie agroalimentaire et la double prise de conscience du gaspillage alimentaire dans les entreprises et du manque d’activité dans les ESAT nous a poussées à trouver un modèle pour valoriser les matières premières gaspillées en travaillant en partenariat avec les structures du handicap. Et c’est ainsi que nous sommes devenues « les drôles de dames de la biscuiterie » !
Notre raison d’être, ce qui nous anime chaque jour et drive nos décisions, c’est de croquer les codes de l’industrie alimentaire pour les rendre plus solidaires et circulaires.
Les impacts social, environnemental et économique sont au cœur de notre business et très intimement liés puisque plus nous vendons, plus nous sauvons de la matière et plus nous formons des travailleurs handicapés !
Quels ont été les obstacles majeurs que vous avez rencontrés et comment les avez-vous surmontés ?
La première difficulté a été de défendre un nouveau modèle à impact mené par trois femmes dans un milieu encore très masculin. Nous avons lutté contre ces préjugés en réalisant notre projet, en prouvant qu’il avait du sens et qu’il pouvait non seulement fonctionner mais aussi se développer de manière ambitieuse au niveau national.
Nous avons particulièrement été aidées et mises en confiance dans notre démarche par le réseau Entreprendre : il nous a fait bénéficier de son aura auprès de partenaires financiers, institutionnels, de futurs clients potentiels et auprès de chefs d’entreprise qui ont cru en nous et nous ont conforté dans nos choix et dans notre modèle.
Le référencement par la SNCF nous a clairement poussées à changer d’échelle, tout en conférant au projet beaucoup de crédibilité, visibilité et notoriété : répondre à ce type de demande prouve que l’entreprise est en capacité de produire des volumes très importants tout en apportant le service client exigé.
La difficulté actuelle touche à l’envie que nous avons de démocratiser notre modèle et de nous orienter vers la grande distribution et la RHF puisque c’est là que 85 % des français font leurs courses et se nourrissent. Mais les concurrents sur ces marchés sont d’énormes industriels avec des moyens humains et financiers bien supérieurs aux nôtres ! Installer une nouvelle marque sur un rayon ultra concurrentiel est un vrai challenge, même si notre histoire unique rend Handi-Gaspi visible et légitime !
Ces acteurs industriels sont cependant de plus en plus sensibilisés au gaspillage alimentaire, recherchent des solutions et ont besoin de structures plus petites et plus agiles pour les aider à aller vers plus d’impact positif. De vrais partenariats vont naître avec ces entreprises qui nous côtoient dans les rayons puisqu’elles prennent conscience qu’elles peuvent créer des schémas circulaires et solidaires adaptés à leur activité en travaillant avec nous dans un modèle gagnant-gagnant. Ce sera une belle réussite de faire grandir notre impact en s’appuyant sur la force de frappe et l’expertise de ces géants industriels !
Enfin une dernière difficulté est de faire évoluer la vision du consommateur sur l’anti gaspi qui est généralement associé à des produits peu qualitatifs, achetés moins chers. Notre enjeu, c’est de sensibiliser le consommateur, de faire tomber les préjugés et de montrer qu’on peut faire rimer gourmand et militant en réutilisant des matières nobles issues d’invendus de baguette à la française ou de casse de fabrications industrielles comme des coques de macarons, des éclats de chocolat, de gaufres ou de crêpes tout en donnant une deuxième vie à des matières qui sinon seraient jetées !
Comment vois-tu l’évolution d’Handi-Gaspi dans les prochaines années ?
Notre atelier initial arrive bientôt à saturation et nous envisageons d’ouvrir d’autres ateliers en France. C’est la solution pour répondre aux besoins des structures du handicap qui manquent d’activité et pour valoriser les invendus là où ils sont tout en commercialisant au plus proche pour reterritorialiser nos systèmes alimentaires.
Aujourd’hui nous fabriquons à Nantes et nous commercialisons partout en France, mais l’idée de l’essaimage, c’est de fabriquer et commercialiser au plus proche des gisements d’invendus. C’est une façon de faire grandir nos capacités de production et notre impact social et environnemental puisque chaque ouverture d’atelier va générer du travail pour 30 travailleurs handicapés et 30T de pain sauvées.
C’est aussi l’opportunité de diversifier nos matières avec de nouveaux gisements de matières nobles et gourmandes et d’atteindre 70 % d’ingrédients upcyclés dans nos produits !
Handi-Gaspi est la startup lauréate de la catégorie Renforcement de la circularité des Trophées ICI AGRIFOOD. Pourquoi, à ton sens, la circularité est-elle un enjeu pour l’alimentation durable ?
De nombreuses personnes meurent encore de faim dans le monde alors que nous jetons 10 millions de tonnes par an d’aliments consommables tout au long de la chaîne alimentaire, ce qui est aberrant et insupportable. De plus, nous sommes confrontés à une raréfaction des ressources de la planète.
La circularité, c’est la possibilité de moins produire, de moins extraire, de faire en sorte que les déchets des uns deviennent les ressources des autres et d’ainsi mieux respecter les limites de notre planète.
La réflexion sur la circularité amène à bousculer les schémas classiques, fait naître de nouvelles opportunités et favorise des coopérations et des partenariats entre des acteurs qui n’ont pas l’habitude de d’avancer ensemble mais qui sont aujourd’hui dans l’obligation d’inventer de nouveaux modèles en particulier à l’échelle d’un territoire.
De ton point de vue, quels sont les 3 principaux avantages à adhérer à la communauté ICI Agrifood ?
Le premier avantage c’est la possibilité de mieux connaître son écosystème, de créer des coopérations et des synergies entre les différents acteurs du territoire et de favoriser les liens humains. Ensuite c’est la visibilité donnée à des solutions comme la nôtre et la création d’opportunités de rencontres. Et enfin la convivialité et la possibilité de se retrouver ensemble autour de l’alimentation.