Bonjour Armand, peux-tu nous présenter Reus’eat et nous préciser en quoi cette offre est à impact positif ?
Reus’eat est un nouveau matériau qui propose une alternative au plastique du quotidien.
En ligne avec la dynamique de l’économie circulaire, nous revalorisons des co-produits de l’industrie brassicole, les drêches de bière, auxquelles nous ajoutons des bio polymères naturels issus de matières premières renouvelables. Ce nouveau matériau trouve une application directe dans la fabrication de vaisselle et plus précisément de couverts à destination des professionnels de la restauration à emporter, de l’événementiel et des grandes et moyennes surfaces. Les couverts Reus’eat sont 100% naturels, français, biosourcés, réutilisables et, en fin de vie, compostables domestiquement.
En termes d’impact, nous avons donc travaillé sur toutes les étapes du cycle de vie depuis l’origine des matières premières sourcées, une production locale à moins de 300 km de Lyon, en nous positionnant comme acteur de transition entre l’usage unique et le réutilisable et en ajoutant la dimension de revalorisation des produits sous forme de compost en fin de vie.
Quelle a été la genèse de la création de Reus’eat ?
En 2019, dans le cadre du Mastère Entrepreneuriat de l’emlyon business school, j’ai rencontré Marie Nagy, ingénieur en agroalimentaire riche d’une première expérience professionnelle en packaging, qui est devenue par la suite mon associée dans Reus’eat. En tant qu’étudiants, nous avons travaillé ensemble sur un projet dont l’objectif était de trouver une alternative industrielle et éco-responsable au problème du plastique à usage unique. Notre idée de départ était de créer de la vaisselle à base de céréales. Nous nous sommes donc naturellement intéressés aux industries génératrices de déchets céréaliers et en particulier à l’industrie brassicole qui génère 700 000 T de drêches par an en France dont 40% ne sont pas revalorisées.
Peux-tu nous parler de votre parcours d’entrepreneurs et des partenaires qui vous ont aidé à avancer ?
Mettre sur le marché un nouveau matériau est une démarche longuequi nécessite de nombreuses études techniques et scientifiques pour définir très précisément les caractéristiques et propriétés du matériau.
Lors des deux premières années de R&D, nous avons créé le cahier des charges de ce nouveau matériau, travaillé la formulation, testé des recettes ainsi que le process de fabrication dans le but de créer un matériau industrialisable, pouvant s’insérer dans la filière de la plasturgie et plus particulièrement dans celle de l’injection plastique qui permet la fabrication de volumes importants à un coût abordable en phase avec les prix pratiqués pour les articles de vaisselle jetables.
Après une pré-incubation à l’emlyon business school, nous avons été incubés à l’ECAM, ce qui nous a permis de mener des projets de recherche avec des étudiants. Nous avons aussi pu travailler avec une société spécialisée en bio matériaux pour la formulation et le transfert industriel. Suite à cela, nous avons eu une période de tests sur la sécurité alimentaire de nos produits, leur réutilisation ainsi que leur propension à se dégrader dans différents milieux.
Puis l’enjeu de 2022 a été de passer à une échelle plus industrielle. Nous avons affiné, en situation industrielle, nos connaissances des propriétés de solidité mécanique et chimique du matériau ainsi que les caractéristiques du process de fabrication pour, au final, réussir à créer le premier outil de fabrication industrielle de nos produits.
A partir de 2023, nous avons réalisé les premières ventes et les premiers POC commerciaux nous ont conduit à faire évoluer nos objectifs. Au démarrage du projet, l’idée était de remplacer les couverts à usage unique en plastique par des couverts à usage unique plus éco-responsables. Mais ce concept n’était plus en phase avec les nouveaux besoins de consommateurs qui souhaitaient du « réutilisable ». Nous avons donc adapté notre offre pour aller dans ce sens, en faisant évoluer la formulation et le packaging des produits.
Depuis 2024, la distribution de nos produits se développe et nous attaquons le marché de la GMS. Nous avons fait des tests de grande ampleur chez Monoprix et dans les enseignes de sports comme Intersport qui aujourd’hui intègre notre solution.
Les futurs enjeux vont concerner l’accélération de la vente de nos couverts et la diversification de notre gamme.
Tout au long du projet, nous avons été accompagnés par différents partenaires pour structurer la société, réfléchir sur les aspects juridiques, marketing et autres.
Nous avons, par exemple, construit un lien très fort avec Les Premières AURA, incubateur qui nous a accueilli dès 2021 pour la phase de structuration de la société et le développement commercial et au sein duquel nous sommes toujours hébergés. En tant qu’équipe mixte, nous sommes, Marie et moi, particulièrement attachés aux valeurs prônées dans cet incubateur sur l’entrepreneuriat au féminin et le développement de la mixité dans le milieu entrepreneurial.
En 2023, nous avons intégré l’accélérateur Le Zesteur pour consolider la chaîne de valeur de Reus’eat et accélérer nos ventes.
Quelles ont été les plus grandes difficultés de cette aventure entrepreneuriale ?
Entreprendre c’est être résilient, déterminé, croire en son projet et réussir sa mise sur le marché.
Dans notre cas vient s’ajouter le fait que nous nous positionnons comme acteur du changement dans une transition de l’usage unique au réutilisable. Nous devons convaincre nos clients et le consommateur final sur ce changement d’usage. Nous profitons d’une réelle dynamique globale d’évolution des mentalités. De plus, nous avons aussi bousculé l’écosystème de l’emballage avec des enjeux technologiques et industriels forts, il nous a donc fallu du temps et de l’acharnement !
Reus’eat est startup totem ICI Agrifood : comment décrirais-tu cette communauté et quels sont les avantages pour une startup d’intégrer ce réseau ?
ICI Agrifood, c’est un « accélérateur d’échanges » : sa grande force est de faciliter les relations entre les startups et des grands groupes, parfois difficilement accessibles, mais aussi de faire connaître la logique entrepreneuriale, de la rendre visible, audible et compréhensible auprès de ces acteurs afin de rendre possible des collaborations ou partenariats indispensables à leur développement.
ICI Agrifood, c’est aussi une communauté de startups qui ont envie de s’engager et d’apporter des innovations et des réponses concrètes à un écosystème de l’alimentation confrontés à de grands défis d’avenir.